Xavier Grosclaude, le 3 févr. 2017

En 2017, plusieurs pays européens vont être en campagne électorale dans un contexte international tendu avec de nouveaux acteurs aux profils atypiques  et aux idées incertaines …

En 2017, la France a rendez-vous avec le Politique ou pas …

 

En mai prochain, l’élection présidentielle sera une élection décisive pour la France car elle marquera la fin d’un cycle politique inspiré par le XXe siècle. Le fascisme, le nazisme, le communisme, ont été condamnés par l’Histoire, reste le socialisme relégué au musée des utopies faute de réalisme.

Point positif s’il en est, quel que soit le résultat final de l’élection, le personnel politique français est condamné à se renouveler et l’offre politique à se caler sur les enjeux du XXIe siècle. Dans cette perspective, le nationalisme identitaire d’extrême-droite ou son frère jumeau, le nationalisme plébiscitaire d’extrême-gauche, n’est pas une solution d’avenir pour la France mais une dangereuse nostalgie à forte valeur ajoutée négative.

En réalité, au-delà des idées défendues par les trois forces politiques en présence (réactionnaire, conservatrice et progressiste), l’enjeu de la prochaine élection présidentielle réside principalement  dans le retour du Politique au détriment de la comptabilité

En effet, il est possible d’être un fervent défenseur de l’entrepreneuriat et d’être conscient d’une vérité à jamais intemporelle, la France n’est pas une entreprise ! C’est une Nation dont le génie ne doit rien à un « compte de résultat » ou à un « bilan » mais à des hommes et des femmes de tous horizons habités par le goût de l’excellence et du dépassement pour leur pays.

Faire de la Politique, c’est s’interroger, par exemple, sur le bon périmètre et les missions de l’Etat, sur l’utilité et l’efficacité de certaines politiques publiques. Débatte sans fin du nombre exact de postes de fonctionnaires à supprimer ou à créer c’est faire de la comptabilité or malheureusement, depuis le scandale Enron, nous le savons tous, il n’y a rien de plus trompeur que la comptabilité…

 

En 2017, l’Union européenne a rendez-vous  avec son avenir ou pas …

 

L’Union européenne est un projet politico-économique dont la réussite est sans équivalent dans le monde. Les citoyens européens, blasés par la Démocratie libérale, ont rarement conscience du chemin parcouru en soixante ans pour imposer unité et fraternité à tout un continent déchiré pendant des siècles par la haine de « l’autre » au nom du nationalisme.

Si aujourd’hui, l’Union européenne est connue et reconnue comme un acteur économique, spatial, humanitaire, culturel, technologique … de tout premier plan dans le Monde, elle doit profiter de cette réussite pour écrire une nouvelle page de son Histoire en devenant une « Puissance Continental de Contact » capable de parler à tous les continents et de proposer des solutions équilibrées aux parties prenantes. Cela suppose au préalable pour l’Union européenne de se doter de sa propre Armée en matière de Défense, de son propre Parquet en matière de Justice, de son propre Trésor en matière Monétaire...pour renforcer sa cohésion interne.

Cette évolution logique dans un processus d’intégration politique va nécessiter au global un reformatage de l’Union pour la rendre plus agile, plus proactive mais aussi plus efficace dans des domaines ou des correctifs objectifs s’imposent.

Aussi, au regard du contexte mondial et des nombreux défis (écologiques, diplomatiques, numériques, énergétiques …) à relever, le temps n’est plus aux tergiversations byzantines sur l’utilité de l’Union mais à sa consolidation pour optimiser un mode de gouvernance et de développement, certes imparfait, mais qui a montré sa solidité.

En ce début d’année et à l’approche du Sommet de Rome, l’erreur politique la plus grossière pour l’Union européenne serait de répondre à la médiocrité du populisme ambiant par la médiocrité d’un immobilisme émollient.

 

En 2017, le Monde va connaitre de dangereuses surchauffes ou pas … 

 

Pour la première fois de son Histoire les Etats-Unis d’Amérique vont être dirigé par un Président milliardaire de son état, élu avec le soutien du Ku Klux Klan, qui n’a ni culture politique, ni culture européenne - encore moins internationale - mais seulement un solide tropisme russe, un narcissisme décomplexé et un art consommé de la transgression.

Dans le même temps, le Président « à vie » de la Fédération de Russie n’a aucune raison objective de stopper les actions de désinformation engagées, notamment au sein de l’Union européenne, pour déstabiliser les démocraties libérales de l’intérieur, ni de ralentir son soutien aux mouvements populistes et dictatures aux abois dans le Monde. L’annexion par la Russie de la Crimée en Ukraine après l’Ossétie du Sud et l’Abkhazie s’inscrit à l’évidence dans une stratégie militaire visant à renforcer la présence de la Russie au-delà de ses frontières. La modernisation de la base navale de Tartous en Syrie et l’implantation de bases aériennes en Turquie - mais aussi en Syrie - font partie intégrante de cette stratégie.

Nouvel épicentre du nouveau siècle, la prochaine puissance économique et militaire mondiale sera un pays officiellement communiste réfractaire à toute forme de démocratie mais ouvert au capitalisme financier et à l’expansionnisme territorial en Mer de Chine avec la création continue de bases militaires sur des ilots captés unilatéralement sans résistance faute d’habitants…  

Ces trois réalités conjuguées à l’instabilité chronique des pays musulmans, à la montée en puissance du césarisme populiste dans le monde (Turquie, Philippines…) et à la persistance du terrorisme Islamo-mafieux vont faire entrer le Monde dans une séquence de « Paix Guerrière ».

Aussi, ne serait-il pas étonnant d’assister, dans les prochains mois, à de grandes manœuvres destinées à délégitimer les instances multilatérales (ONU, OMC, OMS…), à contester le droit international, à légitimer des revendications territoriales (y compris dans l’Arctique…) et à alimenter des guerres non-déclarées officiellement mais bien réelles (guerre psychologique, guerre numérique , guerre idéologique, guerre médiatique, guerre monétaire …).

Ces guerres non-déclarées vont devenir une constante des relations internationales car contrairement à une idée communément admise, nous ne vivons pas dans un Monde multipolaire ancré dans la géographie mais dans un Monde Global traversé par d’intenses tensions culturelles entre la civilisation du « je », portée par l’Occident, et celles du « nous ».

Ces tensions ne sont pas nouvelles, elles ont toujours existé mais l’émergence d’Etats-Continents aux aspirations nationalistes, la pression des mouvements populistes sur les démocraties libérales et la diffusion dans le monde d’un fanatisme religieux d’essence totalitaire les ont passablement exacerbées.

Dans ce contexte, les interventions publiques du nouveau Président américain en matière de politique étrangère ne pourront pas longtemps se limiter à une reprise en anglais des déclarations de Vladimir Poutine, à des tweets approximatifs sur l’actualité internationale et à des propos accusatoires sur le fonctionnement de ses services sinon l’année sera erratique pour tout le monde sur fond de guerre commerciale, est-ce souhaitable ? Pas vraiment…

 

Xavier Grosclaude est Délégué Général de Fenêtre sur l’Europe

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