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par Jean-Sylvestre Mongrenier, le mardi 23 juin 2009

« Il est mal de dire du mal du mal »

André Glucksmann


Après l'« injuste guerre » d'Irak, l'Afghanistan et la guerre que l'OTAN mène sur ce théâtre d'opérations étaient censés absorber une bonne part de l'effort politique et militaire américain. De fait, le dispositif militaire a commencé de basculer vers l'Hindou-Kouch. Pour l'administration Obama, l'Iran et son programme nucléaire relèveraient en revanche d'une approche diplomatique renouvelée, fondée sur les intérêts bien compris des protagonistes. Entre hommes de « bonne volonté », tout serait possible … La mise en œuvre d'un « Smart Power » autoproclamé comme tel permettrait même d'envisager un grand marché américano-iranien sur la scène géopolitique régionale, du Proche-Orient à l'Afghanistan. L'axe politique Khamenei-Ahmadinejad - le Guide suprême de la révolution islamique soutient le coup d'Etat -, et la sécession mentale d'une partie des Iraniens ont ébranlé cette Realpolitik sommaire et réductrice.


Bien que la chose n'ait pas été clairement avouée, l'administration Obama s'attendait à ce que le « discours du Caire » (3 juin 2009) - un texte parsemé de contre-vérités historiques, complaisamment présenté comme une initiative refondatrice -, entraîne des conséquences positives immédiates, ce qui illustrerait l'efficacité du « story-telling » jusque dans les relations internationales. Ainsi l'issue des élections législatives libanaises, le 7 juin dernier, était-elle déjà interprétée comme relevant de l'effet-Obama . Il restait à conclure cette première étape sur la scène politique intérieure iranienne, avec la déroute du président sortant, Mahmoud Ahmadinejad, et la victoire présentée comme inéluctable de Mir Hossein Moussavi. La plupart des commentateurs et analystes n'ont guère remis en cause ce discours de type performatif ; comme à l'accoutumée, ils ont insisté sur la vitalité et la modernité de la société iranienne, négligeant la nature du régime et ses logiques de fonctionnement.


« Regime change » et Grand Moyen-Orient


En fait, les rivalités entre clans et hommes du sérail au sommet de la république islamique ont débouché sur une crise politique majeure ; les manifestations ne cessent pas et Moussavi semble jouer un rôle qui dépasse ses intentions initiales. Quant au Guide suprême de la Révolution islamique, il a explicitement apporté son soutien à Ahmadinejad . Comme en d'autres lieux, l'heure du « regime change », sur fond de bouleversements géopolitiques régionaux, aurait-elle donc sonné pour l'Iran? En 2003, William Kristol et Lawrence F. Kaplan, deux figures intellectuelles emblématiques du mouvement néo-conservateur, avaient publié un essai intitulé Notre route commence à Bagdad . La menace islamo-terroriste y était interprétée comme le produit des maux qui frappent le Moyen-Orient - tyrannies, mal-développement et enfermement psycho-culturel – aggravés par le « réalisme » des chancelleries occidentales et leur obsession du statu quo. Dans une large mesure, leur diagnostic faisait écho aux pénétrantes analyses de Bernard Lewis, grand orientaliste américain qui a clairement anticipé les conséquences de la révolution islamique iranienne. Ainsi est-il le premier à formuler l'expression de « choc des civilisations », en 1979, ensuite reprise par Samuel P. Huntington, l'un de ses pairs intellectuels .

Selon William Kristol et Lawrence F. Kaplan, l'effondrement du régime criminel de Saddam Hussein devait être le point de départ d'une entreprise de libéralisation et d'émancipation du « Grand Moyen-Orient » (Greater Middle East), une immense aire qui s'étire des rivages atlantiques du Maghreb jusqu'au golfe Arabo-Persique et à l'Afghanistan, partie prenante des géopolitiques méditerranéennes depuis l'invasion soviétique de 1979-1980 et les conflits qui ont suivi (Jihad antisoviétique, talibanisation et « guerre contre le terrorisme »). Paix, prospérité et démocratie de marché pointaient à l'horizon. En décembre 2002, le secrétaire d'Etat de la première administration Bush, Colin Powell, avait lancé une initiative en ce sens, reprise et adoptée lors du G8 de Sea Island (Etats-Unis), les 8-9 juin 2004 (le « Partenariat pour un avenir commun avec la région du Moyen-Orient élargi et l'Afrique du Nord »). De leur côté, les autorités européennes (le Haut Représentant pour la PESD et la Commission) avaient adopté l'expression de « Moyen Orient au sens large » (Wider Middle East) pour désigner une sorte de Processus de Barcelone étendu au golfe Arabo-Persique.


De l'axe chiite au front panislamique


Cette version renouvelée de la théorie des dominos et le rêve de « pax democratica » qui inspirait l'action régionale des Etats-Unis (un « wilsonisme botté » qui n'est pas sans rappeler le bonapartisme de la campagne d'Egypte) ont très vite buté sur les réalités politiques et stratégiques moyen-orientales : perpétuation de la guerre en Irak, poussée de l'islamisme sur le plan électoral, islamo-guérillas au Liban et à Gaza, sur fond de menaces et d'actes terroristes. Avec la fin de la tyrannie baasiste et de la domination arabo-sunnite sur l'Irak, la Mésopotamie et une large part des territoires à l'est de Suez - avec leurs populations chiites (majoritaires en Irak et formant des minorités conséquentes dans le Golfe) -, semblent alors basculer vers l'Iran et le monde islamo-persan.

A la tête d'une alliance entre chiites (Iran-Syrie-Hezbollah), Téhéran parraine le Hamas et se veut le chef de file d'un front panislamique - un « front du refus » élargi -, en opposition à l'« axe Washington–Tel-Aviv » et aux Occidentaux. Usant de la couverture diplomatique que lui offrent la Russie et la Chine, tout à leur « coalition anti-hégémonique », Téhéran poursuit sa marche obstinée vers le nucléaire guerrier, voie et moyen d'une stratégie de sanctuarisation agressive, du Golfe à la Méditerranée orientale . L'embargo économique ne suffit plus à endiguer les prétentions iraniennes et le pouvoir de nuisance de Téhéran - en Irak, au Proche-Orient et en Afghanistan - hypothèque le recours à l'option militaire (bombardement des sites nucléaires). Le président iranien va jusqu'à explorer la possibilité d'un nouveau tiers-mondisme d'envergure planétaire et, pour ce faire, cherche des connexions avec le pétro-bolivarisme (le « socialisme du XXIe siècle ») d'Hugo Chavez .


Une « troisième révolution » ?


Le coup de force d'Ahmadinejad et de ses partisans pour radicaliser plus encore l'islamisme iranien, l'amorce d'une « troisième révolution » (une révolution islamo-justicialiste) et les chocs en retour invalident le scénario de la « superpuissance » régionale. Placée sous embargo international, l'économie iranienne est épuisée - Téhéran importe même du pétrole et du gaz - et le comportement des hommes au pouvoir (gabegie et corruption) contredit chaque jour le moralisme d'Etat qui tient lieu de formule politique, nonobstant le zèle coercitif des Pasdarans (Gardiens de la révolution) et Bassidjis (les « mobilisés ») , ces « gardes-rouges » de l'islamisme radical. Aux frontières orientales, le jihadisme taliban menace de déborder sur le Baloutchistan ; aux frontières occidentales, l'expérimentation par l'Irak d'une forme de « gouvernement décent », certes encore fragile, pourrait exercer des influences positives jusqu'à Téhéran. Dans le Golfe, les régimes arabes sunnites manœuvrent pour endiguer les ambitions iraniennes, avec l'appui des Occidentaux. Le soutien apporté à Ahmadinejad par l'Organisation de Coopération de Shanghaï, lors du sommet d'Iekaterinbourg (16 juin 2009), ne suffira pas à contrebalancer les reclassements régionaux.

Il serait hâtif de miser sur le succès d'une version iranienne des « révolutions de velours » - le sang a déjà coulé - et de tenir pour acquis les bouleversements géopolitiques qu'impliquerait l'effondrement du « régime des mollahs », régime dont l'unicité est mise à mal par les déchirements internes et les déclarations de certains ayatollahs . Le temps du monde et les rythmes politiques ne sont pas ceux de la logique et des chaînes de raisonnement serrées; c'est par là que certains théoriciens néo-conservateurs ont péché. De même ne faut-il pas négliger le poids des enracinements anthropo-culturels, cédant ainsi aux délices et poisons de l'ingénierie socio-politique (l'Irak de 2003, on l'a compris, n'est pas la Pologne de 1989). Au vrai, les tenants de la French Theory qui décomposent la réalité pour la réduire à un jeu de déconstruction-reconstruction, privé de toute référence à la nature des choses, ne sont pas les mieux placés pour penser des politiques articulées sur les identités particulières, sans perdre de vue le général (que l'on ne confondra pas avec l'Universel).

Il n'en reste pas moins que les attentats du 11 septembre et le cycle de conflits alors déclenché ont brisé le statu quo régional, libérant des forces qui se jouent des calculs politiques et des stratégies étatiques. Que l'Iran bascule dans le chaos ou que le régime se durcisse, la diplomatie de la main tendue, ses tenants et ses aboutissants, sont bousculés par la dynamique des événements. La prudence est une vertu cardinale, certes, mais elle ne doit pas être confondue avec l'attentisme ; il serait aujourd'hui fallacieux de mettre sur le même plan Ahmadinejad et Moussavi, au prétexte que ce sont deux hommes du sérail. L'issue du bras de fer ne sera pas sans conséquences sur la crise nucléaire comme sur l'ensemble des conflits géopolitiques régionaux qu'Ahmadinejad s'efforce d'interconnecter. L'Iran et le Moyen-Orient sont en ébullition, les mots doivent céder la place à d'autres mots et, dans un monde soumis à l'accélération des processus, l'objectif de « stabilité » ne peut tenir lieu de weltanschauung. Il faut remettre l'ouvrage sur le métier.

Abstract

After the “unfair war” of Iraq, the Afghanistan and the war waged by NATO over that theatre of operations were meant to absorb a large part of the US political and military efforts. Indeed, the military system is beginning to tip up towards the Hindu-Kouch. For the Obama Administration, Iran and its nuclear program would rather be a part of a new diplomatic approach based on the shared interests of the protagonists. Among men of good will, everything would be possible … The deployment of the “Smart Power”, self-defined as so, would allow to think of a US-Iran great bargain over the geopolitical regional scene, from Near-East to Afghanistan. The political axis between Khamenei and Ahmadinejad – the Supreme Guide supports the coup d'Etat – and the mental secession of a part of Iranian people have shaken that scant and reductionist geopolitical approach.


Jean-Sylvestre Mongrenier est Docteur en géographie-géopolitique (Université de Paris VIII), et chercheur associé à l'Institut Thomas More. 






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