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par Jean-Sylvestre Mongrenier, le jeudi 30 octobre 2008

L'Azerbaïdjan est l'unique pays du Bassin de la Caspienne, producteur et exportateur d'hydrocarbures, qui soit directement relié aux marchés européens par un tube d'acier. Ce simple fait suffirait à lui conférer une haute valeur géopolitique. Plus encore depuis la guerre de Géorgie, l'Azerbaïdjan est au cœur de luttes d'influence entre Russes et Occidentaux. Tout juste réélu président, le 15 octobre 2008, Ilham Aliev s'est vu proposer par Dmitri Medvedev, l'organisation d'un sommet avec son homologue arménien, en vue de régler la question du Haut-Karabakh. La Russie entend ainsi faire basculer les équilibres régionaux en sa faveur et contrôler l'accès aux ressources de la Caspienne. Cette stratégie régionale vise les timides efforts de l'Union européenne pour diversifier et sécuriser son approvisionnement énergétique. Le « Partenariat oriental » de l'Union européenne est dans la ligne de mire.


Hâtivement assimilé à une pétromonarchie du Golfe Arabo-Persique, l'Azerbaïdjan, « Dubaï de la Caspienne », est une république issue de la dislocation de la « Russie-Soviétie ». Peuplés avant l'an Mil de populations d'ethnie iranienne au centre et au sud, kurde et arménienne à l'ouest, caucasienne au nord, les territoires qui forment l'actuel Azerbaïdjan ont été pour partie incorporés dans la Perse des Sassanides (IIIe siècle) puis dans la sphère arabo-musulmane (seconde moitié du VIIe siècle). C'est en 1025 que les Turcomans, emmenés par Arslan Israïl , font irruption et bousculent la géographie ethnique locale. D'ethnie turco-mongole, les Azéris se forment, en tant que peuple, à la croisée des empires ottoman, perse et russe ; c'est en opposition au sunnisme des Ottomans qu'une large partie de la population se convertit au chiisme, religion officielle des Séfévides . La frontière entre l'actuelle République d'Azerbaïdjan et les zones de peuplement azéri sous souveraineté iranienne a été fixée en 1828, par le traité de Turkmentchoï. Au cours du XIXe siècle, l'Empire russe prend ensuite possession de l'Azerbaïdjan comme de l'ensemble du Caucase du Sud.

Avec une superficie restreinte (89 000 km²) et une population de taille modeste (8,6 millions d'habitants), l'Azerbaïdjan n'atteint pas la masse critique nécessaire pour se poser en acteur géostratégique, capable d'exercer une politique d'influence au-delà de ses frontières étatiques. Toutefois, sa situation et, plus encore, son poids en termes d'hydrocarbures, en font un pivot géopolitique ; l'orientation diplomatique et stratégique de ce pays a des répercussions sur l'ensemble d'une région-carrefour, entre Orient et Occident, où différents systèmes géopolitiques sont en interaction. L'Azerbaïdjan extrait quelque 860 000 barils de pétrole par jour et devrait bientôt atteindre le million (les gisements d'Azeri-Chirag-Gunesli sont exploités par un consortium que mène British Petroleum). L'essentiel de cette production est exporté vers l'ouest, par l'oléoduc Bakou-Tbilissi-Ceyhan (BTC), la « république »-sœur de Turquie jouant le rôle de pont énergétique vers l'Ouest. Des quantités moindres transitent via les ports de Novorossisk (Russie), Batoumi et Soupsa (Géorgie).

Les gisements pétroliers d'Azerbaïdjan pourraient être épuisés à l'horizon 2020 mais le gaz aura d'ici là pris le relais. Le gisement de Shah Deniz fournit 8,6 milliards de m3 par an et ces quantités pourraient être multipliées par deux dans les cinq prochaines années. Ces ressources devraient, elles aussi, être exportées vers l'Ouest au moyen du gazoduc Bakou-Tbilissi-Erzerum (BTE), en cours de construction (il serait opérationnel en 2009). La construction du Nabucco (3300 km), projet officiellement soutenu et promu par l'UE, renforcerait les interconnexions et dépendances croisées entre l'Azerbaïdjan et les marchés européens. Encore faut-il préciser que le gaz d'Azerbaïdjan ne suffirait pas à rentabiliser ce projet, conçu pour un transit de 30 milliards de m3 par an ; il faudrait que le Kazakhstan et le Turkménistan apportent aussi des volumes, ce qui implique la construction de gazoducs transcaspiens . Si l'on fait abstraction des tensions géopolitiques régionales et des problématiques caucasiennes pouvoirs –territoires, l'avenir semble donc ouvert pour l'Azerbaïdjan. Le pays bénéficie d'un énorme apport en devises, les taux de croissance économique battent tous les records et le second mandat présidentiel d'Ilham Aliev pourrait être marqué par l'amplification de la modernisation sociale et des réformes institutionnelles, nonobstant les effets pervers liés à ce processus (voir le « malaise hollandais »).

Outre la stratégie énergétique, l'autre grande question nationale porte sur le sort du Haut-Karabakh (le Nagorno-Karabagh), majoritairement peuplé d'Arméniens. Suite à une guerre amorcée en 1991, alors que l'URSS éclatait, cette province et sept régions adjacentes (le cinquième de l'Azerbaïdjan) sont passées sous contrôle arménien, la conquête du corridor de Latchin assurant la liaison entre l'Arménie et le Haut-Karabakh. Depuis le cessez-le-feu de 1994, signé sous l'égide de l'OSCE, ce conflit est « gelé » mais les tensions sont fortes et le pétrole a dopé les dépenses militaires de l'Azerbaïdjan . Fondé en 1992 pour favoriser un règlement négocié de ce conflit territorial, le Groupe de Minsk de l'OSCE, co-présidé par la France, la Russie et les Etats-Unis, n'a pas encore ouvert la voie d'une solution de compromis. En représailles, l'Azerbaïdjan et la Turquie, sa « république-sœur », ont fermé leurs frontières avec l'Arménie qui pour sa part entretient des relations cordiales avec l'Iran et étroites avec la Russie. Membre de l'OTSC (Organisation du Traité de Sécurité collective), l'Arménie compte sur son territoire 4000 soldats russes et accueille d'importants investissements réalisé par Gazprom et d'autres sociétés russes, notamment dans le domaine des infrastructures et de l'énergie. D'aucuns évoquent un conflit larvé entre l' « axe » Moscou-Erevan-Téhéran et l' « axe » Ankara-Tbilissi-Bakou (soutenu par Washington).

Au vrai, Ilham Aliev s'emploie à mener une politique d'équilibre entre la Russie et l'Occident, ménageant la première pour se garantir des marges de manœuvre avec les puissances occidentales, les Etats-Unis en premier lieu. Pays membre de la CEI (Communauté des Etats Indépendants), signataire du traité de sécurité collective de 1992, l'Azerbaïdjan est sorti de ce système militaire (comme la Géorgie) et n'appartient donc pas à l'OTSC. Toutefois, il loue le radar de Gabala à la Russie . Outre l'ouverture d'un corridor énergétique méridional vers l'Europe, le rapprochement de l'Azerbaïdjan avec les puissances occidentales se traduit sur le terrain par une présence américaine non négligeable (énergie et sécurité), la participation active au Partenariat pour la Paix de l'OTAN et l'insertion dans la Politique européenne de voisinage de l'UE, bientôt renforcée par un « Partenariat oriental », décidé en juin 2008. Les actes suivent et l'Azerbaïdjan a envoyé des troupes en Irak et en Afghanistan. Le positionnement de Bakou quant au gazoduc Nabucco sera décisif pour la suite des événements.

Le coup de force de la Russie en Géorgie (août 2008) et la volonté désormais attestée de conserver le Caucase du Sud, dans ce qu'elle considère être son « étranger proche », ont entre-temps modifié les équilibres régionaux. En bombardant des terminaux pétroliers du littoral géorgien et en frappant à proximité du BTC, la Russie a rappelé que le corridor énergétique méridional, qui conditionne le désenclavement du bassin de la Caspienne, était à portée de tir. Le renforcement de la présence militaire russe en Abkhazie et en Ossétie du Sud , et le refus de revenir au statu quo ante (prise de contrôle des gorges de Kodori, en Abkhazie, et de la région d'Akhalgori, en Ossétie du Sud), constituent une menace permanente sur cette autre voie d'approvisionnement énergétique de l'Europe. Enfin, le précédent géorgien vaut avertissement, pour l'Azerbaïdjan comme pour l'Ukraine et l'ensemble des pays membres de la CEI que certains, à Moscou, imaginent déjà comme une forme d'Union post-soviétique, russo-centrée. A cet égard, le refus des pays concernés de suivre la Russie et de reconnaître les régimes séparatistes d'Abkhazie et d'Ossétie du Sud est un revers diplomatique qui mérite l'attention des chancelleries occidentales. Il faudra suivre aussi l'impact de la crise financière sur l'économie et la société russes, bien plus fragiles que ne le laissent à penser les postures et logomachies des officiels.

Vis-à-vis de l'Azerbaïdjan, la menace implicite de recourir à la force, particulièrement en cas de conflit avec l'Arménie, s'accompagne de propositions diplomatiques et économiques visant à réaffirmer la domination russe dans le Caucase du Sud ; les lecteurs tardifs de Joseph Nye emploieront à tort et à travers l'expression (déjà datée) de soft power, mais il ne s'agit en fait que d'alterner sanctions positives et négatives (« la carotte et le bâton »). Dans ce jeu diplomatico-économique, virtuel puisqu'il relève de représentations du futur, l'une des « carottes » que manipulent les dirigeants russes est l'hypothétique règlement, sous l'égide de Moscou, du conflit du Haut-Karabakh. Dans un entretien accordé à la Rossiiskaya, en date du 7 octobre dernier, Sergueï Lavrov a ainsi la possibilité de mettre fin au conflit arméno-azéri dans les semaines à venir. En visite à Erevan, le 21 octobre suivant, Dmitri Medvedev a proposé l'organisation d'un sommet en Russie sur cette question (en novembre ?). Schématiquement, la Russie serait prête à convaincre l'Arménie de faire d'importantes concessions en contrepartie des quelles l'Azerbaïdjan et la Turquie accepteraient de mettre fin au blocus des frontières arméniennes. Subsidiairement, cela permettrait à Moscou de rétablir le contact matériel avec les forces déployées en Arménie, le passage par le territoire géorgien étant verrouillé depuis août 2008. Quant à l'OSCE, n'en déplaise à ceux qui relaient la proposition russe de « pacte de sécurité paneuropéen », elle serait contournée.

L'autre « carotte » agitée par la diplomatie russe consiste en un rachat, au prix européen, de la production de gaz azerbaïdjanais. Bakou se détournerait ainsi du projet Nabucco et des interconnexions avec l'Occident pour rallier le South Stream, projet rival porté par la Russie. Les volumes concernés sont restreints par rapport à la production de Gazprom - qui certes a pris des engagements dépassant ses capacités de production et n'a guère investi dans les gisements russes -, mais cette perspective permettrait d'accroître la dépendance énergétique de l'Europe et de renforcer la « main » russe. Parallèlement, le Kremlin préempte le gaz kazakh et turkmène, cherche à entraver le développement de gazoducs transcaspiens et joue avec l'idée d'une « OPEP du gaz ». Dans les schémas géo-énergétiques russes, l'Iran est ainsi invité à se détourner des marchés européens pour exporter sa production vers l'Asie du Sud et de l'Est . Cette vision russe du nouvel ordre des choses, dans l'Ancien Monde, est pour le moins significative. Moscou instrumentalise l'américanophobie d'une partie des opinions publiques, en France notamment, pour s'assurer de complaisants relais dans diverses capitales européennes. Pourtant, l'Union européenne en tant que telle et les projets qu'elle porte – politique énergétique commune, engagement dans le voisinage commun UE-Russie et « partenariat oriental » - sont les vraies cibles. A ceux qui répercutent mécaniquement les éléments de langage de la diplomatie russe, il faut rappeler que l'analyse géopolitique ne consiste pas à dessiner des « patatoïdes » sur un planisphère ; les mots, les discours et les représentations doivent être disséqués, afin de dévoiler les géopolitiques-pratiques.

Au total, on comprend l'importance qu'il faut accorder à l'Azerbaïdjan, comme à l'ensemble de l'aire géopolitique mer Noire-Caucase-Caspienne, si l'on veut assurer la liberté, la sécurité et la prospérité de l'ensemble européen. Aussi faut-il sortir des généralités généralisantes, en finir avec l'illusion d'un dépassement de la puissance (l'Univers n'est-il pas une Kratophanie, un déploiement de puissance ?) et renforcer la présence collective européenne sur le terrain. Le déploiement d'observateurs de l'UE aux limites des régimes séparatistes de Géorgie ouvre la voie ; il y a peu encore, l'UE se refusait à surveiller la frontière entre la Géorgie et la Tchétchénie. Les réserves des uns et des autres - quant à l'élargissement de l'OTAN, à l'engagement de l'UE ou à l'ouverture de corridors sécurisé-, n'ont que trop entamé la crédibilité des Européens et compromis la stratégie de diversification des approvisionnements énergétiques. Pourquoi d'ex-républiques soviétiques prendraient-elles des risques que certains pays n'entendent pas même penser et conceptualiser? Parler de paratonnerres suffirait-il donc à attirer la foudre ?

Azerbaijan is the only Caspian country, productive and exporter of oil and gas, which is directly connected to the European markets through a pipe-line. That one fact would be enough to give it a high geopolitical value. More again since the War of Georgia, Azerbaijan is in the heart of power struggle between Russian and Westerners. Just re-elected as president, on October 15th, 2008, Ilham Aliyev was proposed by Dmitry Medvedev to organize a summit with his Armenian counterpart, Serzh Sarkisian, in order to settle the Karabakh conflict. Thus, Russia intends to tip the regional balance on its side and to control the access to the Caspian's resources. This regional strategy aims the shy endeavour of the European Union's for diversifying and securing its energetic supply. The Eastern Partnership of the European Union is in the line of sight.


Jean-Sylvestre Mongrenier est chercheur à l'Institut Français de Géopolitique (Paris VIII) et chercheur associé à l'Institut Thomas More (http://www.institut-thomas-more.org).Spécialisé dans les questions de défense – européenne, atlantique et occidentale - il participe aux travaux du Groupe de réflexion sur l'Europe de la défense CEREM-IPSE.

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