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par Jean-Sylvestre Mongrenier, le lundi 29 septembre 2008

La guerre menée par la Russie contre la Géorgie en août 2008 et l'annexion de facto de l'Abkhazie et de l'Ossétie du Sud ont modifié les équilibres régionaux et continentaux. Cette guerre-éclair a démontré par le fait l'inexistence d'un système de sécurité régional et le retour en force de la Russie dans le Caucase devrait limiter les ambitions multipolaires d'Ankara, en quête d'un arrangement avec son voisin du nord sur le maintien d'un statu quo qui n'existe plus. Ainsi la récente proposition turque d'un pacte de sécurité régional n'a-t-elle guère eu d'écho en Russie. Il faut pourtant accorder attention aux possibilités que recèle le GUAM (Géorgie-Ukraine-Azerbaïdjan-Moldavie), un forum de coopération régionale entre des pays soucieux d'échapper à la logique de l'« étranger proche ». Encore les puissances occidentales ne doivent-elles pas en faire une structure d'attente par défaut, repoussant sine die l'insertion de ses membres dans le système euro-atlantique. Le GUAM doit être soutenu pour faciliter la coopération régionale, certes, mais aussi pour promouvoir les intérêts des Occidentaux dans l'aire mer Noire-Caucase-Caspienne, élargir leur espace de manœuvre et ouvrir l'Asie centrale à la libre circulation des flux.



La guerre, la situation qu'elle a générée en Géorgie et l'occupation par les troupes russes du tiers du territoire appellent l'attention sur le Caucase du Sud, une des zones-pivots de l'économie et de la géostratégie mondiale. Après 1991, la dislocation de l'URSS a permis à l'Arménie, à la Géorgie et à l'Azerbaïdjan de donner corps à leur indépendance mais le « découpage territorial cynique » que les bolcheviques avaient antérieurement fait subir à la région a exaspéré tensions ethniques et litiges frontaliers. Dans la première moitié des années 1990, plusieurs conflits armés ont remis en cause les frontières héritées de la période soviétique : la Russie a instrumentalisé les séparatismes d'Abkhazie et d'Ossétie du Sud pour soustraire à Tbilissi de larges parties du territoire géorgien ; l'Arménie a pris le contrôle politique et militaire du Haut-Karabagh, sous souveraineté azerbaïdjanaise mais majoritairement peuplé d'Arméniens. La dernière guerre en date, celle d'août 2008, traduit la propension russe à recourir aux armes pour faire prévaloir sa volonté et dominer le Caucase du Sud. Nonobstant les déchirements de cette aire, les économies locales sont entrées dans une phase de forte croissance et l'écoulement des hydrocarbures de Caspienne par le corridor énergétique méridional - oléoducs Bakou-Tbilissi-Ceyhan et Bakou-Tbilissi-Soupsa ; futur gazoduc Bakou-Tbilissi-Erzerum - confère une haute valeur stratégique au Caucase du Sud.

Puissance régionale liée à la Russie par l'énergie et le commerce, la Turquie cherche à donner corps à sa doctrine de profondeur stratégique en promouvant l'idée d'une « plate-forme caucasienne de stabilité et de coopération ». Cette initiative diplomatique rassemblerait autour de la Turquie, auto-promue « honnête courtier », la Russie, l'Arménie, l'Azerbaïdjan et la Géorgie. Evoqués de manière informelle, les projets de coopération régionale vont de la promotion des échanges économiques au développement de mécanismes de gestion des crises, à l'instar de ce qui existe au sein de l'OSCE (Organisation de sécurité et de coopération en Europe). Dans les représentations géopolitiques turques, cette « plate-forme » pourrait être utilisée pour faciliter le règlement des conflits et litiges qui opposent les Russes aux Géorgiens, les Arméniens aux Azerbaïdjanais, les Turcs aux Arméniens. A Ankara, d'aucuns ont voulu voir dans la guerre d'août 2008 l'opportunité à saisir pour tenter une sortie par le haut et mettre en œuvre une diplomatie multipolaire. Ali Babacan, ministre des Affaires étrangères de Turquie, s'est ainsi placé au centre des consultations et échanges diplomatiques régionaux. Le 2 septembre 2008, son homologue russe, Sergueï Lavrov, s'est rendu à Istanbul, avec en toile de fond un grave conflit commercial entre la Russie et la Turquie .

D'emblée, la gravité du conflit russo-géorgien et l'absence de confiance entre les hypothétiques partenaires régionaux rendaient très incertain l'exercice diplomatique turc ; rien n'est donc sorti de la visite de Lavrov. La Turquie n'a d'ailleurs pas la masse critique suffisante pour contenir les fortes pressions russes dans le Caucase du Sud, apporter des garanties de sécurité aux autres pays et faire prévaloir des solutions coopératives dans l'ensemble de la région. Elle n'est pas non plus en position d'arbitre : très fortement liée à l'Azerbaïdjan, la Turquie est impliquée dans l'improbable règlement du conflit territorial entre Erevan et Bakou sur le Haut-Karabagh ; ses frontières avec l'Arménie sont toujours fermées et le processus de sortie de crise n'est pas encore amorcé . Par ailleurs, l'envolée des chiffres du commerce extérieur avec la Russie ne doit pas dissimuler la dépendance à l'égard des approvisionnements énergétiques et des marchés russes. Aussi la Turquie développe-t-elle ses liens avec les républiques turcophones d'Asie centrale qu'elle considère comme son « étranger proche ». Trois semaines après la signature du cessez-le-feu en Géorgie, le ministre turc de l'énergie se rendait au Kazakhstan et au Turkménistan pour y affirmer la volonté de rester partie prenante des équilibres géopolitiques centre-asiatiques .

Bien que contrebalancé par l'affaiblissement financier et les sorties de capitaux des derniers mois, le retour de puissance de la Russie dans le Caucase du Sud obère donc la diplomatie multipolaire turque ; le projet de « plate-forme » de sécurité est d'ores et déjà dépassé par les réalités géopolitiques. Il est patent que le seul intérêt pour Moscou d'un tel système serait de consolider et de légitimer, sur le plan international, l'annexion de facto de l'Abkhazie et de l'Ossétie du Sud. Le Caucase est une zone d'expansion historique de la puissance russe et Moscou entend contrôler, directement et indirectement, l'ensemble de cet espace, versant sud compris. Ainsi l'opération menée en Géorgie vaut-elle avertissement pour l'Azerbaïdjan, virtuellement tenté par une aventure militaire contre l'Arménie, elle-même alliée de la Russie et membre de l'OTSC (Organisation du traité de sécurité collective). Les enjeux géostratégiques dépassent la seule dimension régionale, le Caucase du Sud ouvrant sur la mer Noire et l'Europe à l'ouest, la mer Caspienne et l'Asie centrale à l'est, le Moyen-Orient au sud. Les menaces qui pèsent sur la Géorgie, partiellement démantelée, reviennent à prendre le contrôle des axes de circulation entre l'Europe et le bassin de la Caspienne. « Pour la Russie, résume Gaïdz Minassian, seul compte un Caucase du Sud fragmenté et sans pivot, le regard tourné vers Moscou ». Cette vision des choses ne laisse guère d'espace à un véritable système régional fondé sur la coopération et la réciprocité.

La Turquie peut donc bien chercher à préserver ses étroites relations énergétiques et commerciales avec la Russie, il n'en reste pas moins que la géoéconomie n'est pas là de prendre le pas sur la géostratégie. Elle ne saurait mener une diplomatie de fermeté et d'engagement dans son hinterland centre-asiatique sans s'adosser à un partenariat global renouvelé avec les puissances occidentales, via son appartenance à l'OTAN et les accords d'association qui la lient à l'UE. Dans une telle optique, il faudrait trouver les voies et moyens de conjuguer les efforts des Turcs et des Occidentaux pour donner plus de substance à un forum régional déjà existant : le GUAM. Cet acronyme désigne une structure consultative, fondée en 1996, qui regroupe la Géorgie, l'Ukraine, l'Azerbaïdjan, la Moldavie. De 1999 à 2005, le GUAM inclut aussi l'Ouzbékistan et cette instance comprend un « U » supplémentaire, correspondant à la dénomination anglaise de ce pays d'Asie centrale (Uzbekistan). En opposition à la doctrine russe de l' « étranger proche », l'objectif du GUUAM est de consolider l'indépendance et la souveraineté de ses Etats membres par rapport à Moscou. Ces pays jouant un rôle clef pour l'évacuation des hydrocarbures de la Caspienne et la consolidation du pluriversum géopolitique post-soviétique, ils bénéficient de l'aide financière et politique des Etats-Unis, de l'appui turc, du programme TRACECA de désenclavement financé par l'Union européenne (programme aujourd'hui abandonné).

Malgré la volonté de certains membres du GUUAM de faire de cette instance consultative une structure de sécurité, l'initiative ne va guère au-delà de variations diplomatiques et énergétiques. Dans l'après-Guerre froide, les principaux gouvernements de l'UE privilégient en effet leur « partenariat » avec la Russie et ils n'accordent donc guère d'intérêt à des schémas géopolitiques autres ; il ne faudrait pas manquer de respect à la Russie convalescente. Les Etats-Unis travaillent quant à eux à la transformation du GUUAM en une enceinte de coopération subrégionale appuyée par l'Occident, relais d'influence dans le « milieu des empires ». C'est pourquoi les pays membres du GUUAM sont conviés au sommet atlantique de Washington, en avril 1999, alors que l'OTAN mène des opérations militaires en Serbie et au Kosovo (sous souveraineté serbe). La « révolution des roses » (Géorgie, 2003), la « révolution orange » (Ukraine, 2004) et les nouvelles dispositions du gouvernement moldave en faveur des instances euro-atlantiques ouvrent des perspectives géopolitiques au GUUAM.

Bien que n'appartenant pas au GUUAM, la Roumanie appuie les efforts de la Géorgie et de l'Ukraine en faveur d'une plus grande autonomie régionale. Elu à la présidence en décembre 2004, Traian Basescu joue des larges ouvertures maritimes de la Roumanie et de son adhésion à l'OTAN pour prôner une grande stratégie centrée sur la mer Noire. De fait, avec l'élargissement de l'OTAN, et bientôt de l'UE, à la Roumanie et à la Bulgarie, les Occidentaux sont désormais engagés dans l'aire géopolitique mer Noire-Caucase-Caspienne. Dans leur voisinage immédiat, des pays comme la Moldavie, l'Ukraine, la Géorgie, se trouvent en situation d'interface, à l'intersection de deux « systèmes » géopolitiques : le système euro-atlantique et le système euro-asiatique. Réunis les 21-22 avril 2005 à Chisinau (Moldavie), les pays membres du GUUAM affirment leur commune volonté de sécuriser la mer Noire et de la transformer en une « nouvelle Méditerranée ». Invitée à ce sommet, la Roumanie se pose en médiatrice entre l'Occident d'une part, le GUUAM de l'autre. Pourtant, les gouvernements des pays membres ne parviennent pas à réaliser une percée politique. De plus, Islam Karimov, président de l'Ouzbékistan, est absent. Il se méfie des « révolutions de couleur » et entend ménager Moscou. Le mois suivant, la brutale répression du soulèvement d'Andijan (mai 2005) accélère le retrait ouzbèke. Les pays membres de l'UE et de l'OTAN protestent, Islam Karimov annonce que l'Ouzbékistan se retire du GUUAM. Soulignons le fait que si les Etats-Unis étaient représentés à Chisinau, l'UE en tant que telle ne l'était pas.

La diplomatie a ses lenteurs mais les objectifs posés s'inscrivent dans la durée. Réunis les 22-23 mai 2006, à Kiev, les chefs d'Etat du GUAM – Mikhaïl Saakachvili (Géorgie), Viktor Iouchtchenko (Ukraine), Ilham Aliev (Azerbaïdjan) et Vladimir Voronine (Moldavie) – semblent déterminés à s'engager de manière concertée dans une politique d'ensemble plus cohérente et plus affirmée. Cette coopération a pour idée maîtresse de faire du GUAM « un pont vers l'OTAN et l'Union européenne ». Les lignes de force de ce projet sont la diversification des sources d'approvisionnement énergétique et l'ouverture de nouvelles voies d'acheminement pour les hydrocarbures de la Caspienne , tant pour renforcer l'autonomie des pays du GUAM que pour faire valoir à ceux de l'OTAN et de l'Union européenne le possible renforcement d'un corridor énergétique qui échapperait à l'emprise russe. Rappelons à cet égard que l'oléoduc Bakou-Tbilissi-Ceyhan entre en fonction en 2006. Le sommet de Kiev se tient en présence de pays diplomatiquement proches, membres ou futurs membres de l'UE et de l'OTAN : la Lituanie, la Pologne, la Roumanie et la Bulgarie. Leurs gouvernements pèsent à l'intérieur des instances euro-atlantiques pour y promouvoir l'axe mer Noire-Caucase-Caspienne comme « nouvelle frontière ».

Entre 2006 et 2008, le GUAM ne s'est pourtant pas imposé comme structure de coopération régionale ; les hésitations des gouvernements européens et leurs réticences à ouvrir de claires perspectives à ses membres, aussi bien dans le cadre de l'UE que dans celui de l'OTAN, n'ont pas aidé à la chose. Aujourd'hui, le retour en force de la Russie dans le Caucase-Sud et les menaces ouvertes à l'encontre de pays de l'aire géopolitique considérée, menacent, en l'absence d'un fort soutien extérieur, de vider de substance le GUAM. La Russie a violé l'intégrité territoriale de la Géorgie et veut en faire un exemple pour les Etats successeurs de l'ex-URSS, dans le Caucase et au-delà . Du moins l'intervention diplomatique de l'UE a-t-elle permis de préserver la souveraineté géorgienne et les grandes orientations extérieures du pays bénéficient toujours d'un fort consensus politique national. Les dernières déclarations des instances euro-atlantiques témoignent d'une réelle prise de conscience des dangers et vont dans le sens d'un plus grand engagement régional.

Autre pays membre du GUAM, l'Ukraine est ouvertement menacée par les officiels russes qui évoquent son possible démantèlement territorial au profit de la Russie (Sébastopol et la Crimée, voire toutes les régions de peuplement russe et russophone). Les rivalités de pouvoir entre le président et son premier ministre ne suffisent pas à expliquer l'éclatement de la coalition pro-occidentale et, là aussi, l'absence de perspectives claires ne peut que pousser à la recherche d'accommodements avec le pesant voisin oriental. A l'ouest des frontières ukrainiennes, la Moldavie n'a pas été non plus encouragée dans ses aspirations occidentales et Moscou appuie les séparatistes de Transnistrie pour contrôler l'évolution du pays et légitimer le maintien d'un bon millier de soldats russes. Des menaces à l'encontre de Chisinau ont été proférées au plus haut niveau, par Dmitri Medvedev, les diplomates russes faisant valoir en contrepoint un possible arrangement qui institutionnaliserait le rôle de Moscou et écarterait l'UE. Enfin la politique d'équilibre d'Ilham Aliev, entre les Etats-Unis et les instances euro-atlantiques d'une part, la Russie de l'autre, est bousculée par les fortes pressions russes et les menaces qui pèsent sur l'évacuation des hydrocarbures azéris par le corridor énergétique sud-caucasien . Le jeu russe a pour ambition de faire éclater le GUAM et d'écarter les Occidentaux du Caucase et de la Caspienne.

A contrario, les Occidentaux ont intérêt à mutualiser leurs politiques dans la région, via l'UE et l'OTAN, et à promouvoir le GUAM comme cadre de coopération régionale et structure d'appui. Pour ce faire, la libre souveraineté de la Géorgie et de l'Ukraine doit être soutenue et renforcée par un ferme appui occidental : ces deux pays devraient se voir accorder le statut de candidat officiel à l'OTAN et de pays associé à l'UE. La route sera longue encore, incertaine et semée d'embûches, mais la pensée et la conduite d'une grande stratégie ne relèvent pas des illusions rationalistes charriées par le planisme et le déterminisme historique. L'ouverture de claires perspectives à l'Ukraine faciliterait la formation d'un consensus politique intérieur quant à l'avenir du pays. La stabilisation de l'Ukraine et la plus grande lisibilité des politiques occidentales pourrait en retour inciter les dirigeants moldaves à ne pas sacrifier leur souveraineté extérieure au bénéfice de la Russie qui use et usera du levier « transnistrien » comme outil de pression et de coercition.

De même, la consolidation de l'Etat géorgien est cruciale pour l'Azerbaïdjan qui ne peut délaisser le corridor énergétique méridional sans se placer dans la dépendance des oléoducs et gazoducs russes. Soucieux de préserver sa politique d'équilibre entre Russes et Occidentaux, les dirigeants azerbaïdjanais ont déjà témoigné de l'intérêt qu'ils portent à la coopération régionale en général, au GUAM en particulier, pour autant que les structures existantes ne se révèlent pas être des coquilles vides. A ces fins, les Occidentaux pourraient inviter la Turquie à s'associer au GUAM, la coopération régionale servant de support aux timides efforts de règlement des contentieux entre Ankara et Erevan d'une part, Erevan et Bakou de l'autre. La réorientation de l'Arménie vers l'ouest , facilitée par l'activité de sa diaspora en Europe et aux Etats-Unis, permettrait d'élargir et de sécuriser le corridor énergétique vers la Caspienne, essentiel à la diversification et à la sécurité des approvisionnements des pays de l'UE. Quant à la Turquie, elle trouverait là un espace à la mesure de ses ambitions diplomatiques en Eurasie, avec des perspectives plus amples que l'improbable Union pour la Méditerranée.

Ces considérations géopolitiques régionales ne doivent pas dissimuler l'incertitude des évolutions en cours mais pour que les politiques menées par les Occidentaux ne se réduisent pas à réagir avec retard aux initiatives russes, il leur faut penser l'aire mer Noire, Caucase, Caspienne dans un schéma d'ensemble. On ne saurait trop insister sur l'importance de l'OTAN comme instance de mutualisation de la puissance et cadre d'action ; la coordination des politiques militaires et la diplomatie de défense mises en œuvre en son sein contribuent au désenclavement des pays de la Caspienne et au bon déroulement des opérations militaires sur le front afghan. Il faut pourtant se garder de céder au « tout-OTAN ». Dans la durée, l'action collective des pays membres de l'UE et l'élaboration d'un vaste et solide « partenariat oriental » - partenariat énergétique, commercial et sécuritaire -, seront déterminantes pour l'ouverture de l'Asie centrale et la souveraineté effective des différents pays de l'espace ex-soviétique. Outre le maintien d'une ligne de fermeté sur la question géorgienne, l'aboutissement du projet de gazoduc Nabucco constituera l'autre test décisif pour la suite des événements.


From the Black Sea to the Caspian Basin
Scope and limits of the GUAM


The war waged by Russia against Georgia and the de facto annexation of Abkhazia and South Ossetia have changed the regional and continental balance of power. This blitzkrieg has by the fact demonstrated the lack of a regional security system and the return to power of Russia in the Caucasus should limit Ankara's ambition for a multipolar diplomacy, seeking an arrangement with his northern neighbour on maintaining a status quo that no longer exists. Thus the Turkish proposal of a regional security pact hardly echoed in Russia. However, one must give some attention to the possibilities of the GUAM (Georgia-Ukraine-Azerbaijan-Moldova), a forum for regional cooperation among countries seeking to escape the logic of “near abroad”. Yet, the Western powers should not turn the GUAM into a wait-and-see structure by default, to postpone indefinitely the integration of its members into the Euro-Atlantic system. The GUAM has to be supported for regional cooperation, yes indeed, but also to promote the Westerners' interests into the “Wider Black Sea Area”, expand their space for manoeuvre and open Central Asia to the free movement of flows.






Jean-Sylvestre Mongrenier est chercheur à l'Institut Français de Géopolitique (Paris VIII) et chercheur associé à l'Institut Thomas More (http://www.institut-thomas-more.org).Spécialisé dans les questions de défense – européenne, atlantique et occidentale - il participe aux travaux du Groupe de réflexion sur la PESD de l'Institut Prospective et Sécurité en Europe (IPSE).

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