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par Jean-Sylvestre Mongrenier, le jeudi 05 juin 2008

Les premiers pas du "duumvirat" Medvedev-Poutine sur la scène internationale confirment l'ambiguïté de la posture russe. Sitôt en place à la présidence, le 7 mai 2008, Dmitri Medvedev a sans surprise nommé son prédécesseur, Vladimir Poutine, à la tête du gouvernement. La Chine populaire a eu la primeur du premier voyage présidentiel à l'étranger, les 23 et 24 mai derniers ; Dmitri Medvedev a ainsi signifié la possibilité de privilégier les relations avec des partenaires autres que les Occidentaux. Quelques jours plus tard, le 30 mai, Vladimir Poutine était accueilli en chef d'Etat à Paris. Le véritable "patron" de la Russie est venu y parler de l'OTAN, du partenariat UE-Russie et des ambitions nucléaires iraniennes. Ce partage des tâches entre les deux têtes de l'Exécutif illustre les ambivalences de la géopolitique russe.


Selon Winston Churchill, "la Russie est un rébus enveloppé de mystère au sein d'une énigme". Cet immense pays était alors sous la domination sanglante de Staline ("Uncle Joe") et, de fait, relevait plus de la géomancie que de l'analyse géopolitique. Cela dit, la Russie contemporaine n'est plus le système clos sur lui-même de la période soviétique, système voué à l'entropie, même si les jeux de pouvoir demeurent opaques et en dépit des velléités de réhabiliter les chefs bolcheviks (exception faite de Trotski) ; l' "énigme russe" peut être partiellement déchiffrée. Pourtant, l'ambivalence historique et géographique de la Russie a encore ses prolongements dans l'ordre géopolitique .

Cette ambivalence se retrouve dans le rapport de la Russie à la puissance. Le retour de Moscou sur la scène internationale et le discours de la Derjava (l'exaltation de la puissance militaire) sont des réalités évidentes. Les dirigeants russes veulent voir en leur pays une "puissance émergente" partie prenante des "BRIC" ("Brésil-Russie-Inde-Chine"). La récente déclaration d'Iekaterinbourg, le 16 mai 2008, a pour ambition de donner forme à ce regroupement informel. Par ailleurs, Moscou joue de son poids énergétique pour se placer au cœur des équilibres internationaux, dans un univers malthusien tenaillé par une "faim" de matières premières.

Cependant, il ne faudrait pas commettre l'erreur inverse des années 1990 et surestimer le potentiel de puissance de la Russie. Rappelons simplement la gravité du krach démographique et sanitaire qui frappe la population ainsi que les difficultés du "système russe" à franchir un certain nombre de seuils technologiques significatifs. L'autoritarisme patrimonial et ses modes de fonctionnement ne vont pas dans le sens d'une insertion optimale de la Russie dans les réseaux globaux de l'économie-monde. Aussi, la qualification de " puissance ré-émergente sur le déclin", au regard de la longue durée, serait-elle peut-être plus adéquate.

Simultanément, il ne faudrait pas sous-estimer la volonté de puissance des dirigeants russes. Certes, le régime politique est basé sur l'acquisition de la rente énergétique (entre autres) et la relation centrale est celle de patron/client. Pourtant, les dirigeants russes ne sont pas animés par la seule soif de richesse et l'esprit de jouissance. Sous l'économique et le primat affiché des "intérêts" (une notion bien vague), le politique affleure. Ces dirigeants sont mus par une confiance en soi et un optimisme historique que l'on peut juger déraisonnable mais qui ne doit pas être nié ; les heurts des dernières années entre Russes et Occidentaux ne sont pas de simples malentendus qu'un quelconque "dialogue" pourrait dissiper.

L'ambivalence de la Russie s'exprime en effet dans les rapports de conflit-coopération qu'elle entretient avec les puissances de l'aire euro-atlantique (Etats-Unis, alliés et partenaires de l'OTAN et de l'Union européenne). Au fil des années 1990, les Etats-Unis constituent la référence obligée et une partie non-négligeable des dirigeants post-soviétiques semble résolue à intégrer leur pays dans la communauté euro-atlantique (George Bush père et James Baker avaient évoqué la constitution d'un vaste ensemble de Vancouver à Vladivostok). Le retournement intervient entre 1999 et 2003 (guerre du Kosovo et crise irakienne) mais il est partiellement dissimulé par les attentats islamo-terroristes du 11 septembre 2001 et leurs effets. L'heure est à la guerre contre la terreur et une "nouvelle relation stratégique" est instaurée entre Washington et Moscou. Aujourd'hui, on ne peut que constater l'inflexion eurasiatique de la Russie (partenariat sino-russe, Organisation de Coopération de Shanghaï), inflexion confirmée par le voyage présidentiel de Dmitri Medvedev à Pékin, les 23-24 mai 2008.

Les dirigeants russes marquent leur distance par rapport à l'Occident et s'opposent à l'élargissement des instances euro-atlantiques en des termes peu amènes. L'OTAN est dénoncée comme un "cordon sanitaire", les Occidentaux sont accusés de vouloir construire de "nouveaux murs de Berlin" et les aspects les plus crus de la logomachie moscovite ne sont pas sans rappeler les tristes heures du Komintern. Dans les grandes affaires internationales, la Russie fait étalage de son pouvoir d'opposition, pour ne pas parler de pouvoir de nuisance, et chaque position est âprement négociée. Dans les conflits qui mettent aux prises les Occidentaux et diverses puissances dites du "Sud", Moscou semble hésiter entre jouer les honnêtes courtiers et se placer sur le fléau de la balance. On songe immédiatement à la question iranienne. La Russie basculerait-elle vers l'Asie ? Cette affirmation serait excessive : elle est tout simplement eurasiatique et ses dirigeants veulent en faire une puissance-pivot.

L'ambivalence des représentations géopolitiques russes concerne au premier chef l'Union européenne en tant que telle, ses Etats membres, et leurs communes perspectives. Les dirigeants russes oscillent entre deux attitudes : le mépris et la crainte. Le mépris va à l'encontre d'une "construction" que d'aucuns prétendent vouée à la Post-modernité, un au-delà des déterminations spatio-temporelles et de la puissance (en-deçà serait plus approprié). L'Union européenne est donc appréhendée à travers le prisme de l'énergie : une simple aire de marché avec laquelle il faut instaurer des interdépendances asymétriques. Ce mépris s'exprime à travers la remise en cause des accords antérieurement signés, pétroliers ou autres, prolongement extérieur du " nihilisme juridique" que Dmitri Medvedev prétend vouloir dépasser à l'intérieur même de la Russie.

Pourtant, ces mêmes dirigeants russes semblent méfiants quant aux virtualités de l'Union européenne comme système géopolitique de coopération et d'intégration, adossée au pilier atlantique via l'OTAN. Son poids démographique, économique, voire militaire, l'ambition de développer une " politique européenne de voisinage" sur ses confins et ses marches font de l'Union un ensemble attractif à même, pour peu qu'elle dépasse un certain seuil d'intensité critique, d'étendre plus encore son influence sur ces territoires que les dirigeants russes veulent considérer comme leur "étranger-proche". Aussi l'Union européenne est-elle perçue à Moscou comme une possible puissance perturbatrice dont le renforcement invaliderait le discours de la Derjava. Cela explique l'hostilité diffuse à l'encontre de Bruxelles, la politique de division des Etats membres de l'Union et la promptitude russe à jouer de tous les instruments de la géopolitique classique pour contrecarrer le renforcement européen. Les positions adoptées par la Russie sur le Kosovo, la poussée économique et énergétique dans les Balkans, le jeu dangereux mené en Géorgie et dans le Caucase-Sud, ne sont pas de simples rémanences et s'inscrivent dans une vision globale des enjeux grand-européens.

Plus qu'un "embarras géopolitique", la Russie est un acteur géostratégique qui interpelle l'Union européenne et ses Etats membres. D'une part, elle constitue le partenaire continental d'une "Très Grande Europe" (Yves Lacoste) de l'énergie et de la logistique ; que l'on songe simplement aux possibilités que recèle le "pont" transcontinental russo-sibérien dans le système des échanges euro-asiatiques. D'autre part, cette même Russie se pose en rival soucieux d'exploiter au mieux les rapports de force, de saisir les opportunités et d'exploiter les litiges entre les Occidentaux et les puissances émergentes d'autres aires de civilisation. A cet égard, les réputés pragmatiques dirigeants russes semblent donner corps à certaines des thèses eurasistes .

Les ambitions russes et les politiques qu'elles légitiment et inspirent obligent à la lucidité. Pour prévenir et anticiper la montée des périls aux frontières et limites de l'Europe, il nous faut saisir les dynamiques géopolitiques à l'œuvre, identifier les servitudes et les virtualités des situations, renforcer la cohésion géopolitique continentale, dans le cadre de l'Union européenne et dans celui de l'OTAN, et tracer des lignes rouges. In fine, il s'agit encore et toujours de prévoir le pire afin qu'il n'advienne pas. Avec en mémoire cette forte pensée de René Girard : "En voulant rassurer, on contribue au pire".


Abstract

The first steps of the « duumvirat » between Dmitri Medvedev and Vladimir Poutine, on the international scene, confirm the ambiguity of the Russian posture. As soon as the new president was in place, on May 7th 2008, he unsurprisingly named his predecessor at the head of the government. On May 23rd-24th, Red China enjoyed the privilege to greet Dmitri Medvedev for his first trip abroad. Thus, the new president meant the opportunity to focus on relations with other partners than the Westerners. A few days later, on May 30th, Vladimir Poutine was greeted in Paris as a head of state. The real “boss” of Russia came to talk about NATO, the Russian-European partnership and the Iran nuclear ambitions. This division of tasks between the two heads of the Russian Executive is as an illustration of the ambivalence of Russian geopolitics.








Jean-Sylvestre Mongrenier est chercheur à l'Institut Français de Géopolitique (Paris VIII) et chercheur associé à l'Institut Thomas More (http://www.institut-thomas-more.org).Spécialisé dans les questions de défense européenne, atlantique et occidentale, il participe aux travaux du Groupe PESD de l'Institut Prospective et Sécurité en Europe (IPSE) et du Centre d'Etudes et de Recherches de l'Ecole Militaire (CEREM).

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