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par Thierry Chopin, le lundi 07 avril 2008

Le traité de Lisbonne est une condition nécessaire mais non suffisante de toute relance de l'Union européenne. A l'heure de la mondialisation, des questions essentielles comme la sécurité et la défense ne peuvent trouver leurs solutions qu'à l'échelle européenne. La France et le Royaume-Uni ont un rôle clé à jouer dans ce domaine. Une véritable vision stratégique de l'Union repose sur un "consensus" porté par quelques pays précurseurs. La France et le Royaume-Uni, au prix d'ajustements de leurs positions traditionnelles, devraient pouvoir construire une nouvelle "entente amicale" servant de base à un tel "consensus stratégique". Un dialogue approfondi, notamment à propos de leurs positions respectives vis-à-vis des Etats-Unis, et la participation à des projets conjoints (consolidation de l'Europe de la défense, gestion des crises internationales, lutte contre le réchauffement climatique...) pourraient renforcer une entente franco-britannique qui marquerait l'émergence véritable de l'Union européenne sur la scène internationale.


Le traité de Lisbonne, actuellement en voie de ratification, est une condition nécessaire mais non suffisante de toute "relance" de l'Union européenne : cette "relance" a désormais besoin de s'inscrire dans un horizon politique clair qui permette de donner un nouveau sens à la construction européenne tout en conduisant les Etats qui le souhaitent à s'engager dans de nouvelles initiatives communes. C'est dans l'introversion que la construction européenne a trouvé son sens pendant un demi-siècle : elle avait en effet avant tout vocation à réconcilier des pays qui s'étaient plusieurs fois déchirés, au point de perdre la prééminence qu'ils avaient exercée pendant des siècles au niveau international. Ce miracle géopolitique étant largement considéré comme un acquis, notamment chez les jeunes générations, il est probable que c'est désormais en refondant son identité sur le plan externe et en faisant la preuve de son utilité dans le monde globalisé que l'Union créera les conditions d'une relance politique à la fois concrète et durable de la construction européenne.

Dans cette perspective générale, et dans le contexte actuel de mondialisation des enjeux de sécurité, seule l'échelle de l'Union élargie peut permettre aux Etats européens de continuer d'exercer une influence sur la scène internationale. Au sein de celle-ci, la France et le Royaume-Uni ont sans doute un rôle spécifique à jouer. Du fait de leur histoire, de leur géographie, de leurs caractéristiques diplomatiques et stratégiques, les deux pays peuvent jouer un rôle dans la réalisation de ce projet et de ces objectifs. Il est donc essentiel de s'interroger sur les conditions d'un rapprochement entre les positions française et britannique, sans lequel un consensus sur la politique extérieure de l'Union sera difficile à envisager. La récente visite d'Etat de Nicolas Sarkozy à Londres fournit l'occasion d'une première contribution à cette analyse.


1 – Le rôle clé de la relation entre la France et le Royaume-Uni


La définition d'une vision stratégique européenne réaliste suppose l'existence d'un véritable "consensus stratégique", sans doute pas – ce serait illusoire dans le contexte européen actuel – entre l'ensemble des Etats membres qui composent l'Union mais, au moins dans un premier temps, entre quelques pays qui peuvent avoir la volonté politique et les moyens de poursuivre l'objectif d'une diplomatie et d'une défense communes.

Le développement de ce "consensus stratégique" suppose un compromis entre différentes visions de l'Europe. Du point de vue de la France, cela doit conduire à tempérer le discours – très français et partagé un temps par l'Allemagne du Chancelier Schröder – sur le nécessaire avènement d'un monde "multipolaire", et qui laisse à penser que "l'Europe" devrait avant tout avoir pour but de faire pièce à la puissance américaine, discours qui n'a aucune chance d'emporter l'adhésion d'un nombre significatif d'Etats membres de l'Union. Cet ajustement semble dorénavant largement engagé. On peut percevoir en effet une inflexion dans le discours de la France sur les Etats-Unis, discours porté notamment par le Président de la République. Si l'Europe est présentée comme devant assumer son rôle de "puissance", sans lequel le monde serait privé d'un pôle d'équilibre nécessaire, la complémentarité de l'OTAN avec le développement de l'Europe de la défense est néanmoins affirmée très clairement : en bref, si l'Union doit se constituer comme une puissance dans le monde multipolaire en formation, ce n'est certainement pas contre les Etats-Unis qu'elle doit le faire... Par ailleurs, les pays les plus atlantistes – Royaume-Uni, bien sûr, mais aussi bon nombre de "nouveaux" Etats membres d'Europe centrale et orientale – doivent non seulement clarifier leur attitude et se poser la question du réalisme d'une stratégie passive, reposant exclusivement sur la présence américaine, mais aussi, tirer toutes les conséquences d'une autre réalité incontournable : le fait que l'Europe n'est plus une priorité stratégique pour les Etats-Unis.

La reconnaissance et l'acceptation de ce qui précède met en évidence le fait qu'une nouvelle entente avec le Royaume-Uni pourrait constituer la clé de voûte de la politique européenne et internationale de la France. Sans un compromis historique entre la France et le Royaume-Uni, l'Union européenne et l'Alliance atlantique resteront irrémédiablement divisées contre elles-mêmes et aucun Etat européen ne parviendra, à lui seul, à relever les défis internationaux auxquels tous doivent faire face.

Si les deux pays se caractérisent par une certaine proximité en termes de "culture de puissance" – passé impérial, possession de l'arme nucléaire, siège de membre permanent au Conseil de sécurité de l'ONU, effort budgétaire similaire en matière de défense, etc. –, les obstacles à cette nouvelle "Entente amicale" sont bien connus et demeurent très importants. Les visions britannique et française de la construction européenne et du partenariat transatlantique demeurent philosophiquement opposées, le Royaume-Uni étant à la fois hostile par principe à tout abandon de souveraineté et favorable à une dilution de la spécificité européenne au sein d'un ensemble atlantique dirigé, par l'intermédiaire de Londres, depuis Washington. Cette vision s'enracine dans l'héritage politique (la souveraineté du Parlement), stratégique (la vision impériale et maritime, le maintien de la division du continent européen) et culturelle (l'identité des civilisations britannique et américaine) de l'histoire britannique. Mais elle repose également sur des intérêts bien réels. La coopération anglo-américaine dans le domaine du renseignement, les échanges dans le domaine des technologies militaires de pointe constituent pour le Royaume-Uni des atouts non négligeables et ne pourraient être aisément partagés avec d'autres partenaires.


2 – Vers une "nouvelle Entente amicale" ?


Les événements de ces dernières années pourraient néanmoins modifier ces données et ces calculs. La guerre en Irak a démontré au Royaume-Uni le danger d'un alignement trop inconditionnel sur l'Amérique. En même temps, la crise diplomatique du printemps 2003, au sein de l'Union européenne et au Conseil de Sécurité de l'ONU, a mis en évidence le coût potentiellement très élevé d'une rupture franco-britannique pour la diplomatie et les intérêts du Royaume-Uni. La volonté de tout faire désormais pour éviter la réédition d'un tel scénario a conduit le Royaume-Uni, dès la fin 2003, à s'éloigner des Etats-Unis et à se joindre aux négociations initiées par la France et l'Allemagne au sujet du programme nucléaire iranien. Alors que le successeur de Tony Blair, Gordon Brown, devra tirer les conséquences de l'échec britannique en Irak et s'attacher à rétablir l'influence britannique sur la scène européenne, la pérennisation du partenariat anglo-franco-allemand au-delà de la question iranienne apparaît comme une solution évidente et potentiellement décisive. En raison du crédit que lui a valu son implication aux côtés d'Angela Merkel dans la sortie de l'impasse institutionnelle dans laquelle l'Union était bloquée depuis le printemps 2005, le président français Nicolas Sarkozy se trouve en bonne position pour suggérer cette démarche à ses deux partenaires, tout en assurant aux autres Etats membres de l'Union qu'ils ne seront exclus d'aucune délibération future concernant de nouvelles initiatives communes de Berlin, Londres et Paris sur la scène internationale.

En dépit des difficultés à prévoir, les conditions d'un rapprochement franco-britannique paraissent envisageables. L'histoire européenne des dernières années a été marquée par deux événements majeurs : la décision du Royaume-Uni de soutenir l'invasion américaine de l'Irak sans consultation préalable de ses partenaires européens ; le rejet par la France du projet de traité constitutionnel, sans que ce rejet s'accompagne, jusqu'au "traité simplifié", d'une proposition alternative crédible. Ces deux exemples mettent en évidence quelles sont les conditions fondamentales d'une relance européenne. Ayant pu constater à quel point ces deux décisions avaient nui à leur pays respectif, pour chacun des successeurs de Jacques Chirac et de Tony Blair, une partie au moins de la solution à ce problème se trouve de l'autre côté de la Manche. C'est en acceptant de s'entraider que la France et le Royaume-Uni parviendront au mieux à rétablir leurs positions respectives sur les scènes européenne et internationale, et en particulier sur leurs relations à l'égard des Etats-Unis.

Les projets d'action conjoints entre la France et le Royaume-Uni sur la scène internationale ne manquent pas : outre la consolidation de l'Europe de la défense et des dispositifs européens de gestion des crises internationales, la lutte contre le réchauffement climatique au niveau mondial, l'aide aux pays africains et la réforme des institutions internationales constituent, dans l'immédiat, les thèmes de rapprochement les plus prometteurs. Pourraient venir ensuite, en conjonction avec l'Allemagne, une politique européenne commune vis-à-vis de la Russie et des questions énergétiques. Enfin, à partir de l'expérience accumulée lors des négociations avec l'Iran, une démarche et une vision communes vis-à-vis des différentes crises du Proche-Orient pourrait émerger de manière progressive, concernant en particulier l'Irak après le retrait américain, l'Afghanistan et le conflit israélo-palestinien.

Il resterait à convaincre les Etats-Unis, aujourd'hui affaiblis et en quête d'alliés, à se joindre à ces démarches européennes – une perspective envisageable après l'élection présidentielle de novembre 2008... Le départ de George W. Bush permet d'anticiper en effet un tournant prévisible dans la politique étrangère américaine, tournant qui a, d'ores et déjà, été amorcé, même si aucun des deux grands partis n'entend renoncer au rôle dirigeant des Etats-Unis dans les affaires internationales, ni à la place prépondérante de la puissance militaire au sein de ce rôle international. Le successeur de George W. Bush (dont la prise de fonctions aura lieu en janvier 2009) aura très certainement à cœur de prendre le contre-pied de la politique suivie par son prédécesseur. Dans le cadre de ce changement de politique, il est vraisemblable que les responsables américains solliciteront en premier lieu l'aide de l'Union européenne et de ses Etats membres, en particulier des dirigeants français et britannique. Pour les Européens, l'enjeu doit être clair : il s'agit de redéfinir les relations bilatérales sur une base plus réaliste, c'est-à-dire tenant effectivement compte des intérêts et des attentes des deux partenaires et de faire en sorte que les désaccords ponctuels, parfois très marqués, n'empêchent pas la coopération là où celle-ci est possible.

Dans cette perspective, une entente franco-britannique marquerait l'émergence véritable de l'Union européenne sur la scène internationale et répondrait également aux intérêts des deux puissances comme aux intérêts des Européens. A deux conditions néanmoins : que la France réaffirme sa volonté de voir la diplomatie européenne, même autonome, participer à la pérennisation du partenariat transatlantique ; et que les dirigeants britanniques aient l'audace de surmonter les contraintes politiques internes qui pèsent sur l'ancrage européen de Londres et qui ne manqueront pas de ressurgir dans les semaines qui viennent, à l'occasion notamment de la ratification parlementaire du traité de Lisbonne. L'initiative française récente en direction de l'OTAN montre qu'il est possible de déplacer les lignes et permettrait de se rapprocher de la première condition. Cette concession peut-elle suffire à convaincre le Royaume-Uni de reconstruire sa politique extérieure autour d'un partenariat avec la France ?


Conclusion


Dix ans après les accords de "Saint-Malo" et dans le contexte actuel de relance institutionnelle, prendre l'initiative d'un consensus stratégique, porté par l'Allemagne, la France, le Royaume-Uni semble envisageable. Ce consensus pourrait fournir la base d'une volonté partagée par le plus grand nombre possible d'Etats membres de l'Union d'avancer dans certains domaines désormais incontournables : au-delà même des initiatives en matière diplomatique et militaire, il pourrait s'agir d'opérer des rapprochements dans les domaines de la politique de l'énergie, de la lutte contre le changement climatique, mais aussi de la politique d'aide au développement. C'est là une voie qui, mieux peut-être qu'aucune autre, permettrait en effet à la France de "revenir en Europe" tout en redonnant un "horizon de sens" à l'Union européenne.

Questions d'Europe n°94 du 31 mars 208 de La Fondation Robert Schuman


Auteur : Thierry Chopin : Directeur des études de la Fondation Robert Schuman. Professeur au Collège d'Europe (Bruges), il enseigne également au Corps des Mines et à l'Institut d'études politiques de Paris (Sciences Po). 

http://www.robert-schuman.eu

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